Yang
Comme attentif au calme
Ce soir dans le grand ciel, uniforme du soir,
Un bleu, un bleu, un bleu ! Foncé, foncé, du noir.
La ville, ma prison, illumine les mains
Des grands arbres vivants, colorés de carmin.
J'ai respiré la nuit, ma présence au mystère,
Silencieux, sans envie, habitant solitaire.
Et puis je suis parti, marcher, trottoir, devant,
Lampadaire, feuille et vent, voitures, marcher, des gens.
Avancer en silence, comme attentif au calme,
Comme en paix et sans peur, comme si j'avais une âme.
Pour toucher la lumière
L'âme de la liberté, sur son papier couchée,
Qui a travers les siècles, veut du doigt me toucher...
Les annales humaines, les doutes et leurs misères
Qui me donnent à sentir que nous sommes tous frères...
Toi ma sœur de mystère, penchée sur un destin
Qui nourrit de folie tes yeux, d'un grand festin.
Toi mon frère, mon ami, tu écoutes la voix
Entêtante, chantant, dans ton crâne à claire-voie.
Pour toucher ce moment où je suis la lumière
Silencieuse, douce, et qui allume hier
L'impression d'être envie - conscience adossée
A un corps apeuré, fatigué, cabossé...
Pour toucher la lumière, je suis prêt à prier,
Abandonner l'hiver, et accepter d'aimer.
Assis et l'âme lourde
Assis et l'âme lourde, perdu dans le grand lit,
Respirant faiblement, insensible à la nuit,
Grand désenchantement d'un grand corps fatigué,
Je ploie sous un nuage tourbillonnant d'idées.
J'ai tout organisé, j'ai tout bien structuré,
L'avenir, le passé... et je n'y étais pas.
L'amour n'y étais pas. La folie s'est cachée.
Allongé sur le lit. Perdu mon cœur qui bat ?
Je veux du pétillant, du joyeux, du bonheur !
Je veux d'un grand enfant les sourires et sans peur
Je veux être le doigt, de Dieu qui nous regarde
Et qui rit, qui nous suit, dans toute nuit blafarde.
Je voudrais être en vie - mais je ne suis qu'ici,
Spectateur dégonflé d'une histoire ralentie.
Si la métaphysique s'amuse des amants
Les couleurs éclatantes d'un matin lumineux
Du vert étincelant, d'un rayon de ciel bleu,
Où les oiseaux bavards, dont un joli colvert,
Se moquent des murailles du château millénaire...
Le temps s'est arrêté pour les pierres entassées,
Qui font face à l'assaut du vent, tels une marée,
Qui narguent les autos et les passants pressés,
Qui narguent mon vélo, un dimanche apaisé.
Sublime connivence du soleil et du vent.
J'ai pleuré de beauté, tout seul et comme un grand,
De voir que s'entrouvait une porte du temps.
Si la métaphysique s'amuse des amants,
Là elle me fait un cygne - tout blanc et sautillant.
Ma vie s'est égayée d'un moment pétillant.
Pas de chemin droit
Tu vois, je n'attends pas. Je suis flamme brûlante,
Je vais, je viens, sans fin, je suis l'âme fumante,
Rougeoyante tapie ou bien léchante d'envies...
Je suis rugissement, les cris chantant la vie !
J'ai laissé déployer les branches vers le ciel,
Les grandes feuilles belles, ballantes, essentielles.
J'ai laissé foisonner la folie, les envies,
Mes racines puissantes, ardentes poésies !
Il n'y a plus qu'un choix : poésie ou folie !
Et pas de chemin droit ! L'envie ! l'envie en vie !